Les rapports se suivent et se ressemblent. Un rapport interne à l’Éducation nationale révélé par Le Monde, confirme combien la situation est préoccupante dans les écoles. Défaut de transparence, absence de communication des diagnostics, évaluation des risques défaillante, la réglementation amiante est loin, très loin, d’être appliquée comme il faudrait.
Seuls 175 établissements du public et du premier degré sur les quelque 63 000 recensés en France ont été auscultés au cours de l’année 2017-2018. L’échantillon est maigre, mais les résultats sont éloquents. Les inspecteurs santé et sécurité au travail de l’Éducation nationale (ISST) ont visité ces établissements, et dans les 154 écoles où un permis de construire a été délivré avant le 1er juillet 1997, ils ont épluché les DTA, du moins lorsque ceux-ci étaient disponibles.
Car le premier accroc relevé est bien le défaut de communication et de transparence. Pour 46% des écoles assujetties à la réglementation amiante, le DTA n’était tout simplement pas disponible et n’avait pas été communiqué aux directeurs d’écoles. Des repérages avaient-ils seulement été réalisés? Le rapport ne le dit pas. On sait cependant que beaucoup d’établissements restent dépourvus de DTA comme l’avait montré une autre enquête interne à l’Education nationale en 2016. Dans 53% des écoles, la fiche récapitulative n’était pas accessible. Que ce soit au conseil d’école, aux enseignants ou aux agents de la collectivité chargés de l’entretien, les fiches récapitulatives sont rarement communiquées.
Deuxième accroc à la réglementation, l’absence de mise à jour des diagnostics. Alors que tous les DTA devraient avoir été effectués depuis le 31 décembre 2005, deux tiers ont été réalisés après la date limite et 25% d’entre eux après 2015! Et très peu paraissent avoir été mis à jour. En fait, selon le rapport, dans la majorité des cas (57%), le propriétaire semble ignorer si une mise à jour est nécessaire et seuls 9% des propriétaires prévoient effectivement une mise à jour.
La situation apparaît d’autant plus préoccupante que 22% des matériaux et produits contenant de l’amiante apparaissent en mauvais état et que 16% des DTA font état d’une obligation d’état de conservation pour des matériaux et produits de la liste A. Des recommandations qui ne sont pas toujours suivies d’effets. En fait, le risque amiante apparaît très souvent passé sous silence: plus de huit établissements sur dix n’en parlent pas dans leur Document unique d’évaluation des risques !
Rien d’étonnant dès lors que des expositions à l’amiante soient relevées. « Pour 8% des écoles visitées, le registre santé et sécurité au travail -RSST- (6%) et le registre spécial de danger grave et imminent -RDGI- (1%) signalent ce type d’inquiétude« , indique le rapport de synthèse. Celui-ci cite même plusieurs cas d’expositions passives recensées au cours des visites des ISST: entre l’enseignant qui a percé dans un mur pour réaliser un affichage, les élèves qui jouent dans un gymnase ancien « recouvert d’un flocage suspect qui se dégrade rapidement lors des jeux de ballon » … Simples exemples.
Ce nouveau rapport dévoilé confirme l’enquête menée voilà quelques années par l’Observatoire national de la sécurité et de l’accessibilité des établissements d’enseignement (ONS), un satellite du ministère de l’Éducation nationale. Cette vaste enquête révélait alors qu’en 2016, 30% des écoles maternelles et publiques n’avaient toujours pas réalisé de DTA et seulement 36% des écoles publiques construites antérieures au 1er juillet 1997, avait un DTA consultable dans leurs locaux. L’enquête soulignait alors le manque de transparence et les réticences parfois à communiquer le DTA.